Grâce démantelée

Cette oeuvre est née au coeur de la forêt amazonienne, lors de voyages que fit l’artiste en 2022 et 2023. L’expérience du Brésil fut saisissante pour lui, elle l’inspira autant par la beauté naturelle des lieux, que par la gentillesse de ses résidents autochtones. Il découvrit là des lieux d’une splendeur et d’une grâce inimaginables.

Plusieurs expéditions le conduisirent vers des régions éblouissantes, lointaines, difficiles d’accès de la jungle brésilienne. Caipiru, son guide autochtone, très proche de sa culture aborigène lui en facilita l’accès, c’est ainsi qu’il séjourna dans plusieurs petits villages à l’est de Manaus proche de la rivière Mutuca, au sud du lac Acayatuba et aussi dans un petit village de l’ethnie Hunikui (kaxinawa), tribu isolée, vivant selon un mode de vie purement ancestral. Il rencontra des personnes attachantes, chaleureuses aimant partager leur mode de vie, leurscroyances, légendes et rituels,aidant ainsi l’artiste à mieux se pénétrer de l’esprit de ces lieux.

Toute au long des expéditions, la jungle se révéla à lui comme un lieu d’une grandesplendeur, fascinante autant par sa luxuriance végétale que par sa richesseminérale, car le sous-sol brésilien est un véritable coffre aux trésors,qui regorge de précieuses ressources.

Et pourtant, l’oeuvre présentée dévoile un lieu ravagé, une splendeur dévastée, « une grâce démantelée ».

Les tons dominants de gris et de marron de la toile semblent atténuer le drame, et préserver l’illusion paradisiaque.  Toutefois, le constat implacable demeure, et l’artiste dépeint la barbarie moderne et la brutalité des interventions humaines, dont il a été témoin dans certaines régions de l’Amazonie. La fumée caustique omniprésente sur la peinture remplace ici le doux parfum de la flore et trahitle silence de la faune dispersée.

Bien sûr, les sociétés minières du monde entier ne sont pas restées indifférentes devant l’abondance des précieuses ressources naturelles du sous-sol brésilien. Elles ont débarqué dans ces lieux encore vierges avec leurs machineries infernales et elles ont anéanti les terres et transgressé les droits des autochtones qui y résidaient paisiblement, tout celapour dévaster, piller, brûler, et empoisonner.

Justement, à droite de la toile, se trouve la monstrueuse machine minière, annonciatrice de chaos et de mort. Ironiquement, les peuples autochtones ont qualifié les exploitants blancs de « mangeurs de terre », et cette machine fait exactement cela ! Ce mastodonte creuse toujours plus profondément le sol de la forêt déboisée à la recherche des trésors auriques qui alimenteront les marchés de la spéculation et augmenteront la fortune des plus avides. L’excavation de ce magnifique écosystème a entraîné des dommages irréversibles :  la végétation y est dévastée, la faune anéantie, l’eau y est maintenant intoxiquée au mercure et dramatiquement, de nombreuses tribus autochtones dispersées sont menacées d’extinction.

Grâce démantelée a été inspiré non seulement par l’intense indignation de l’artiste en voyant cette gigantesque et majestueuse nature si brutalement profanée, mais aussi par son attachement et son admiration profonde pour le peuple brésilien qui doit mener une lutte persévérante et acharnée pour assurer la survie et la régénération de l’Amazonie.